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dimanche 20 novembre 2011

Rousseau et le contrat social.

Introduction :


"Du contrat social ou Principes du droit politique" est une oeuvre majeure de philosophie politique, écrite par Jean Jacques Rousseau et publiée en 1762 pendant le règne de Louis XV. Rousseau, né à Genève en 1712 et mort en 1778, est un célèbre écrivain et penseur. Ses idées et écrits ont influencé de nombreux protagonistes de la Révolution française et ont marqué ses contemporains qui l'ont adulé ou détesté. En 1762, année de publication du contrat social et de l'Emile (une de ses autres grandes oeuvres) Rousseau est même condamné par le Parlement de Paris pour les propos qu'il tient dans ce dernier ouvrage, et doit s'enfuir. Sa vie est une vie de vagabond. Il est l'un des grands philosophes du contrat social moderne aux côtés de Thomas Hobbes et John Locke, ses prédecesseurs. Notre extrait est tiré du chapitre 6 du Contrat social, qui traite du pacte social. Dans un premier temps, il pose le problème auquel le contrat social doit répondre, à savoir celui du passage pour l'homme de l'état de nature à l'état civil en conservant sa liberté originelle. Il explique ensuite les moyens d'y arriver, les clauses de son contrat, et enfin expose le résultat de l'application de ces clauses. En suivant le raisonnement logique de Rousseau, nous essaierons de comprendre ce qui fait l'originalité de son pacte social. Nous allons donc, dans un premier temps, observer comment Rousseau pose le problème commun à tous les contractualistes du passage de l'état de nature à l'état civil, puis nous analyserons les clauses du contrat rousseauiste pour comprend enfin ce à quoi correspond la société post-contractuelle de Rousseau (post-contractuelle = une fois que le contrat est admis, pas une fois qu'il est expiré).

I / Un problème commun à tous les contractualistes.
 
A) L'état de nature.
Ligne 3 "reste aussi libre qu'auparavant" : que trouve-t-on avant l'acte d'association, avant la mise en application du contrat ? l'état de nature. Cet état de nature est une idée commune aux trois grands contrats sociaux (Hobbes, Locke, Rousseau), l'outil méthodologique de base de contrat social. Il ne représente pas une vérité historique, et Rousseau ne prétend pas dans son contrat social expliquer les origines des sociétés humaines (livre I, chapitre I : "Comment ce changement s'est-il fait ? Je l'ignore"), mais l'état de nature est une hypothèse théorique, une base qui lui permet de développer son raisonnement. Il ne s'agit pas de savoir ce qui a poussé les hommes à s'unir et se soumettre ainsi, mais de chercher à comprendre si cette soumission, contraire à la nature humaine, peut être une soumission légitime. Chez Rousseau, cette nature se caractérise par la liberté propre à chaque être humain, et le droit à la domination n'existe pas. De plus, la liberté étant une qualité instrinsèque à l'humanité, le renoncement à celle-ci n'est pas concevable : ce serait renoncer à son humanité.  Le problème auquel Rousseau tente de trouver une solution est donc de savoir comment passer de cette "liberté naturelle" (ligne 9) (=état de nature) à une "liberté conventionnelle" (ligne 9) (=état civil) tout en conservant sa liberté.
 
B ) Vers l'état civil.
Toute la difficulté du passage de l'état de nature à l'état civil réside dans l'énoncé du problème qui ouvre cet extrait : " trouver une forme d'association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s'unissant à tous n'obéisse pourtant qu'à lui-même et reste aussi libre qu'auparavant". (ligne 1 à 3). Rousseau voit bien la liberté conventionnelle comme supérieure à la liberté naturelle, et ne pense aucunement qu'il soit bon pour l'homme de rester dans cet état de nature. Comme Hobbes, il pense qu'il est nécessaire de rompre avec l'état de nature et que le contrat social est l'unique solution au problème de cette rupture. Mais un point essentiel différencie ici les deux contractualistes : pour Hobbes, l'aliénation se fait au profit d'un homme ou d'un groupe d'homme, alors que chez Rousseau, celle-ci s'exerce au profit de toute la communauté (ce qu'il appelle la "forme d'association" ligne 1), fondée elle-même par le contrat social. 
Rousseau a posé "le problème fondamental dont le contrat social donne la solution" (lignes 4 et 5). Mais alors quelles sont les clauses de ce contrat et que peut-on en dire ?
 
II / Les clauses du contrat rousseauiste.
 
A) Le mystère de leur acceptation
Le chapitre 6 du contrat social (notre extrait), fait apparaitre le processus théorique du pacte social d'une manière claire et intelligible. Mais la nature de l'acceptation des clauses de ce contrat semble être un élément flou et mystérieux. On lit à la ligne 6 que ces clauses n'ont "peut-être jamais été formellement énoncées" mais qu'elles sont "partout les mêmes, partout tacitement admises et reconnues" (lignes 6 et 7). On peut légitimement se demander comment, concrètement, un contrat jamais formellement énoncé peut être admis partout et par tous avec des clauses absolument identiques. On voit que par nature, le contrat de Rousseau implique une sorte d'alchimie collective qui nous en rappelle la nature purement théorique. Si l'acceptation commune des clauses du contrat semble poser un problème pratique, les clauses en elles-mêmes, du moins celle à quoi elles sont réduites est clairement énoncée
 
B) "L'aliénation totale" (ligne 10)
Rousseau écrit aux lignes 10 et 11 de l'extrait : " Ces clauses bien entendues se réduisent toutes à une seule, savoir l'aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté". C'est ici le coeur du pacte social de Rousseau. Cette aliénation est nécessaire pour passer de l'intérêt personnel des particuliers à l'intérêt général de toute la communauté, afin que les hommes soient dirigés par la "volonté générale" (ligne 19). Cette volonté générale, c'est celle de la communauté dans son ensemble, et c'est ce qui doit gouverner les hommes.  Cette aliénation, ce fait de "se donner tout entier" (ligne 12), est en fait la démarche indispensable pour devenir citoyen et donc penser en fonction du bien commun et non d'une manière égoïste. On a reproché à Rousseau d'appeler volonté générale ce qui est en fait la volonté de la majorité, car l'unanimité est un fait rare dans les sociétés humaines. Mais chez lui, la volonté générale n'est pas la somme des volontés particulières, mais elle est ce qui procède de l'intérêt commun. Rousseau explique que chaque personne est divisée entre sa condition d'homme qui lui fait désirer son bien personnel, et sa condition nouvelle de citoyen qui l'oriente vers le désir du bien commun, et que c'est en consultant l'assemblée du peuple qu'elle va se rendre compte que la vérité se trouve dans le désir du citoyen (le bien commun), et non dans la recherche du bien personnel. Au final, l'homme se dénature pour devenir citoyen, et en se soumettant à la volonté générale il se soumet à lui même, donc reste libre.

III / La société post-contractuelle selon Rousseau
 
A) Une conception nouvelle
lignes 21 et 22 = "cet acte d'association produit un corps moral et collectif composé d'autant de membres que l'assemblée a de voix". Cette conception contractualiste est neuve. Chez Locke (Second traité du gouvernement civil : 1690), le contrat social sert à garantir l'état de nature. Chez Hobbes (Léviathan : 1651), il sert à rompre avec cet état de nature dans un but sécuritaire, et donne le pouvoir à un monarque. Rousseau est chronologiquement le dernier des trois grands philosophes du contrat et le premier à donner le pouvoir souverain à tous les hommes unis par le pacte social. Il élimine le roi du pacte social et fait du peuple son propre souverain. Son pacte social n'est plus défini comme le rapport de dominant à dominé qui existe entre le prince et ses sujets (ce qu'on trouvait avant) mais comme un consensus, une convention égalitaire entre tous les hommes (lignes 14-15 : "il n'y a pas un associé sur lequel on n'acquière le même droit qu'on lui cède sur soi"). C'est en cela que ses idées ont marqué les esprits des révolutionnaires et c'est ce qui fait de son oeuvre une référence principale de la Révolution. On peut voir dans ce chapitre une théorisation  de la démocratie.
 
B) Rousseau, un théoricien de la démocratie
A la fin de notre extrait, Rousseau s'attache à illustrer le corps collectif constitué et les hommes qui le constituent, en les définissant selon différents termes : il commence par dire que ce corps collectif "prenait autre fois le nom de Cité, et prend maintenant celui de République" (lignes 24-25). Il fait ici référence aux grandes cités de la Grèce antique (on pense à Athènes et Sparte) et à leurs régimes démocratiques. Il compare donc le régime politique que son contrat social met en place aux grands régimes démocratiques, par là-même il affirme le caractère démocratique de son pacte social. Ce "corps politique" "est appelé par ses membres Etat quand il est passif, Souverain quand il est actif" (lignes 25-26). L'Etat et le Souverain ne font qu'un, comme pendant la monarchie. La célèbre phrase jamais prononcée par Louis XIV "l'Etat c'est moi" se transforme donc, en application du pacte social, en "l'Etat c'est nous" (mais en tant que citoyen), le gouvernement du peuple (étymologiquement : démos = le peuple / kratos = le corps politique, le gouvernement). Enfin, dans la même démarche que pour le corps collectif, Rousseau définit les associés (lignes 28-29) " s'appellent en particulier citoyens comme participants à l'autorité souveraine, et sujets comme soumis aux lois de l'Etat". Dans cette phrase réside l'équilibre du pacte social de Rousseau : le citoyen passe au statut de sujet lorsqu'il se soumet aux lois : mais ces lois sont le fruit de la volonté générale, donc de celle de tous les citoyens, ainsi le sujet est soumis à lui-même, mais nul ne peut réellement être soumis à lui-même, donc il conserve toute sa liberté.
Conclusion
Comme tous les contractualistes, Rousseau utilise l'outil de l'état de nature pour effectuer son raisonnement et construire son contrat social. Pour lui, la rupture avec cet état de nature est essentielle, mais en passant à l'état civil, l'homme doit conserver sa liberté. Pour cela, il est nécessaire que tous les hommes cèdent tous leurs droits à la collectivité. Il est difficile d'imaginer l'application pratique de ce pacte social, mais celui ci théorise bel et bien un certain système démocratique.

Les atouts de la France coloniale selon Paul Leroy-Beaulieu ( 1882 ).

            Les atouts de la France coloniale selon Paul Leroy-Beaulieu ( 1882 ).

    Introduction :

        Paul Leroy-Beaulieu est né en 1843 et décède en 1916, il est issu d'une grande famille bourgeoise de tradition orléaniste. Universitaire et économiste libéral, il est connu comme l'un des premiers, voire le premier théoricien de la colonisation sous la IIIe République. Ses idées sont largement influencées par les écrits de Renan mais aussi par son beau-père, Michel Chevalier, un des penseurs Saint-Simonien. Cette école de pensée est favorable à l'expansion coloniale. Paul-Leroy-Beaulieu lui succède à la chaire des « Sciences Morales et Politiques » au Collège de France. Il obtient un prix de l'Institut en 1870 pour son mémoire intitulé L'étude du système colonial des peuples modernes. C'est à partir de ce mémoire qu'il entreprit l'écriture de De la colonistation chez les peuples modernes dont la première édition paru en 1874. Rencontrant un franc succès dans les milieux scientifiques et les salons il fut complété et réedité une deuxième fois en 1882. En tout cet ouvrage, modifié à chaque réedition, le fut cinq fois jusqu'en 1908. Leroy-Beaulieu est aussi l'auteur du livre Du partage des richesses et le fondateur de L'économiste français.Le texte, ici présent, est extrait de la préface de l'édition de 1882, il dresse dans cet ouvrage un tableau des divers systèmes coloniaux puis dans un deuxième temps de sa théorie générale sur la colonisation. Lors de sa seconde publication la IIIè République, crée en 1871 suite à la défaite et à la chute du Second Empire, entre dans une nouvelle phase avec l'arrivée des républicains au pouvoir en 1879 et l'élection de Jules Grèvy comme Président de la République. Ces hommes politiques, pour certains, sont plus enclins à une politique coloniale comme Ferry et Gambetta respectivement président du Conseil en 1880-1881 et de fin 81 à début 82. Ainsi cet extrait nous propose une vision de la théorie de Leroy-Beaulieu sur les colonies mais également sur la politique. Il commence par une question sur les fautes du passé dans les lignes 1 et 2; puis des lignes 3 à 10 il fait référence au devoir et à la capacité de la France à coloniser; des lignes 11 à 23 il opère une disctinction entre différents types de colonies; des lignes 24 à 31 il émontre l'intérêt économique de ces colonies; et enfin des lignes 32 à 38 il expose sont point de vue sur la politique extérieure française. Ainsi quels sont les atouts de la France coloniale pour Leroy-beaulieu ? Nous répondrons à cette question avec tout d'abord une vue d'ensemble des bases coloniales à l'époque; puis sur les moyens d'exploiter ces colonies et enfin la mission civilisatrice et la politique extérieure de la France.


    I°) Les bases du Second Empire colonial français.

    1)    Fautes et héritages.

    Les dix premières années de la IIIe République apparaissent comme une parenthèse dans l'Histoire de l'expansion coloniale française. La France est profondément touché par la défaite de Sedan et la chute du Second Empire qui s'en suit. Cependant elle a conservé de sa puissance en restant la deuxième puissance industrielle et maritime. La IIIe République hérite aussi de colonies résultant du premier empire colonial mais aussi des politiques menées sous Napoléon III. A la ligne 1 : « les fautes du XVIIIe siècle » auxquelles fait allusion Paul Leroy-Beaulieu fait référence au Traité de Paris, signé le 10 Février 1763, et qui est longtemps perçu comme marquant la perte du premier empire colonial. Ce traité fait suite à la guerre de Sept ans qui oppose entre autres la France et l'Angleterre ( 1756 ), et entraîne la perte de la Nouvelle France ( Quebec et partie de la Louisianne ) préférant défendre avant tout ses intérêts économiques dans le commerce. Cependant en 1814 à la signature d'un nouveau traité certaines puissances européennes rétrocèdent à la France des territoires coloniales. Ainsi, au début de la IIIe République, la France conserve quelques reliquats de colonies où vivent pas loin de 6 millions d'hommes. Elle possède notamment quelques établissements côtiers dont le plus important se situe au « Sénégal » mentionné à la ligne 29 avec le port de Saint-Louis, mais aussi aux « Indes » ( l.13 ) où elle dispose de comptoirs tel Pondichéry ou Chandernagor. La France contrôle toujours Saint Pierre et Miquelon et des îles ( surnommées îles à sucres ) telles la Martinique, Guadeloupe, Guyanne, les Antilles, la Réunion mais ces îles sont pour la plupart en casi léthargie. Ces colonies n'empêchent pas pour autant que la France soit relégué au dernier rang des puissances coloniales en 1814. C'est également la volonté de Paul Leroy-Beaulieu dans ces deux premières lignes de redonner l'envie de grandeur de la France à travers l'expansion coloniale bien que celle-ci « a été relégué au second plan dans la conscience nationale » ( l.33 ) mais aussi le goût pour l'exploration et l'aventure.

        B) Explorateurs et conquêtes récentes.

    Paul Leroy-Beaulieu fait ici l'éloge de ces explorateurs hardis ( l.8 ) et ces « aventuriers aussi originaux et aussi audacieux qu'il y a un siècle » ( l.9-10 ) il fait même une comparaison avec Robert Cavelier de la Salle à la ligne 8 qui explora au XVIIe siècle les territoires entre la région des Grands Lacs et le Mississippi dont il prit au nom du roi possession de la Louisiane. Mais au XIXe siècle ces explorations débutent d'abord par par la motivation de missionnaires catholiques et également par celles des scientifiques, des sociétés gépgraphiques et des associations savantes, milieux qui se passionnent pour la découverte. Avant d'être en partie aidés par les politiques gouvernementales les initiatives sont essentiellement individuelles renforçant le côté audacieux et hardis de ces hommes. On pourrait faire mention de Francis Garnier ( 1839-1973 ) qui participa à des explorations navales en Cochinchine et en Chine au début des années 1860 et en prit même la direction en 1868 pour la découverte du Haut-Mékong. Ou encore de Pierre savogan de Brazza ( 1852-1905 ) qui devint français en 1874 et explore à partir de 1875 l'Ogoué, un fleuve gabonais pais doit vite faire demi-tour devant le manque de moyens et d'hommes. Il repartit en 1879 avec l'appui du gouvernement et fonda Franceville et la future Brazzaville. Enfin il réussit à mettre ces territoires sous la protection française en 1880. Ces territoires deviennent des colonies mais ce phénomène n'est pas nouveau comme le rend compte Paul Leroy-beaulieu à la ligne 4 : « les dernières années en donnent la preuve » et est déjà présent sous la Monarchie de Juillet et le Second Empire. La colonisation de l'Algérie débute en effet à partir de 1830 et le débarquement sur les côtes jusqu'en 1848 où certains territoires sont annexés à la France et sont formés en tant que département. La colonisation de la Cochinchine ( l.7 ) débute en 1859 et se poursuit sous le Second Empire jusqu'en 62 où l'empereur cède trois provinces à la France puis en 1874 où elles sont placées sous l'entière souveraineté française donnant naissance à la Cochinchine. Mais à partir de la fin des années 1870 le régime redonne de l'ampleur à ces expansions comme au Soudan et en Tunisie, entre autres, mentionnés à la ligne 29. Mais pour l'auteur malgré ces conquêtes il manque à la France « l'esprit de suite dans sa politique coloniale » ( l.32 ). En effet la France s'est d'abord contentée d'assurer uniquement la protection des explorateurs. Les initiatives militaires qui suivent sont pour le moins opportunistes et ne se définissent  pas dans une politique coloniale d'ensemble, comme le préconise Paul Leroy-beaulieu c'est à dire en cherchant à créer de vastes territoires continus à partir des bases littorales déjà existantes.


    II°)

    1)    Colonies d'exploitation et capitaux.

    Pour Paul Leroy-Beaulieu, le moteur de l'expansion colonial réside dans l'investissement de capitaux. A la ligne 26 il constate que la France « les dissémine aux quatres coins de l'univers ». En effet, les banques françaises investissent de préférence dans les pays étrangers, indépendants en raison des prédilections des épargnants pour les emprunts publics. Il souhaite ainsi à la ligne 28 « qu'un tiers ou la moitié » ou « le même quart » des capitaux français soient placés dans les colonies. En 1900, les capitaux français investis dans l'empire colonial se montent environ à 1,5 milliards, soit 3,5% du total des capitaux français hors de métropole. En 1906, ils ne sont passés qu'à 1,7 milliards dans le reste de l'Empire soit un total de 7% du total des capitaux hors de France. Les investissements des années qui suivent  la publication de l'ouvrage se montrent nettement inférieurs aux espérances de Paul Leroy-Beaulieu. Il souhaite ce que Lénine appele l'impérialisme financier c'est à dire que durant la grande dépression de 1873 à 1896, dûe à une hausse des investissements, et donc de la production et de la consommation entraîna une baisse des taux d'investissments et ces investisseurs cherchent ainsi des placements rémunérateurs qu'ils pourraient trouver dans les « colonies d'exploitation » ( l.13 ) que Paul Leroy-Beaulieu considère comme des investissements plus sécurisés. L'Etat français a lui aussi intérêt à investir dans les colonies plutôt que dans des projets en coopération avec d'autres Etats comme la Grande-Bretagne pour le canal de Suez. Avec le développement du libre-échange les colonies fournissent un pré carré plus loyale, des débouchés privilégiés pour les marchés de la métropole et des approvisionnements exclusifs en matière première et en denrées alimentaires. Cependant c'est un pari que fait Paul Leroy-Beaulieu car il ne connait pas les ressources africaines et le commerce colonial ne représente que 5 à 6% des échanges. De plus pur les économistes, le capitalisme colonial apparaît comme peu dynamique et s'apparente à du protectionnisme. Aux lignes 29 et 30 il avoue que ces dires sont hypothétiques « nous finirons bien, j'éspère, par assurer notre prédominance ». Il enchaîne avec les résultats supposés « splendides en 25 ou 30 ans » ( l.31 ). Il cherche ici à convaincre le milieu des affaires peu enclins à la prise de risque couteux sans garantie de monopole et où les terres sont peu défrichées et vierges.

    1)    Colonies de peuplement et émigration.

    Paul Leroy-Beaulieu est le premier théoricien de la colonisation à faire une distinction entre « colonies de peuplement » ( l.14 ) et « colonies d'exploitation » ( l.13 ). La colonie, dans son principe de base est de peuplement, dans le but d'alléger la métropole d'une partie de sa population en l'installant des colonies. Cela se fait notamment lorsque la métropole n'arrive plus à subvenir aux besoins alimentaires, forte partie de sa population ou de lui fournir du travail. L'un des arguments des opposants à la colonisation est que « la France n'a pas d'éxubérance de population » ( l.11 ). En effet, entre 1860 et 1890, il y a une dépression économique et donc un fort taux de chômage mais contrairement à ses voisins européens la France a une population moins nombreuse que ses voisins. Le taux de natalité française est lui aussi largement inférieure. Elle ne peut donc pas se priver de sa populatin jeune généralement plus enclin à partir et à travailler. Les opposants à la colonisation et Paul Leroy-Beaulieu s'accordent sur l'inutilité des colonies de peuplement qui à la fois ne résoudraient pas le problème du chômage et risqueraient de diminuer encore plus le poids démographique de la France en Europe. Elles ne sont donc en aucun cas un régulateur de la vie économique. C'est pourquoi Paul Leroy-Beaulieu propose une émigration  faible de l'ordre de « 15 000 à 20 000 colons par an » ( l.18 ). Les chiffres qu'il propose sont similaires à ceux de l'émigration  de la métropole à l'Algérie, mais qui s'appliqueraient à l'ensemble de l'Afrique. Cela représente une faible part de la population pour seulement « servir de cadres » ( l.18 ) à l'administration coloniale et empêche que « l'immigration des étrangers européens » ( l.19 ) ne dépasse pas l'émigration française. Ces chiffres sont largement surestimés par rapport à l'émigration à venir, car elle est peu enclin à partir dans les colonies et nombres ne restent pas une fois sur place. Contrairement à la phrase de la ligne 19 la population d'immigrés étrangers n'est pas « d'égale importance ». En 1900, 800 000 étrangers européens sont installés dans les colonies françaises contre seulement 500 000 français. Cela n'empêche cependant  pas la France de fonder un « grand empire africain et un moindre asiatique » dont Paul Leroy-Beaulieu espère la création ( l.37-38 ). Entre 1870 et 1900 l'empire colonial français passe de 1 000 000 km²  à 10 900 000 km² et place la France comme l'une des nations coloniales les plus puissantes.

    III°)

    1)    La vocation civilisatrice de la France et sa capacité colonisatrice.
   
    Paul Leroy-Beaulieu insiste à la ligne 3 sur « la vocation civilisatrice de la France ». Il croit fermement  que la France, pays des droits de l'Homme et du Citoyen et république non-esclavagiste ( depuis 1848 ) est la mieux placée pour ammener les populations indigènes, sur le long terme au niveau technique, scientifique, politique et administratif de la France. Car pour lui la plus grande partie du monde est soit aux mains de tribus guerrières soit aux mains d'indigènes inaptes à tirer profit des richesses et des terres. Dans la première édition de l'ouvrage il s'attaque aux traitement de populations indigènes, tant dans le présent que dans le passé, ainsi qu'à l'estimation de leur juste droit et de leur acheminement à la civilisation. Il se déclare partisan de l'assimilation des colonies ( en opposition à l'association ) c'est à dire l'extension aux indigènes de la loi, la langue, les idées ou encore des droits politique et des moeurs de la métropole. Pour Paul Leroy-Beaulieu les colonies sont vouées à s'émanciper jusqu'à une forme d'autonomie voire même d'indépendance. Ainsi ces pays « de langue française et d'esprit français » ( l.22 ), et donc proches sur le plan culturel et idéologique, assurent à la métropole une influence internationale et de bonnes relations économiques avec eux. Cette vision est cependant sur le long terme ( l.21 « au bout d'un siècle » ). Dans le cas où cette émancipation est freinée il prévoît la possibilité d'insurrection des colonies pour accéder à cette indépendance. Ainsi cette assimilation doit être graduelle et éviter tous abus de colons.
    Pour justifier la supériorité de la France Paul Leroy-Beaulieu précise à la ligne 5 que « les plus grandes oeuvres de ce temps, en fait de travaux publics extra-européens, sont français ». Parmi ces travaux y figurent certains travaux européenns comme le canal de Suez inauguré en 1869 ou celui de Panama commencé en 1881-1882. Les autres oeuvres coloniales françaises sont nombreuses et y figurent notamment celui du développement du port d'Alger, grâce aux apports de capitaux étrangers, qui devient l'un des principaux ports méditerranéens en ravitaillement et en dépôt d'hydrocarbures. Mais outre ces « grandes oeuvres » ( l.5 ) les Français ont aussi construit de nombreuses villes ( 300 de 1971 à 1895 ) en Algérie mais aussi ont permis l'avancée dans les travaux hydroliques pour l'agriculture. Ces travaux peuvent aussi s'apparenter au social comme l'oeuvre sanitaire, rencontrant un grand succès avec la mise en place, à la fin du XIXe siècle, de services de santé publique. L'enseignement acquiert aussi une part dans cette mission civilisatrice bien qu'elle rencontre des obstacles en termes financiers et également face à une certaine résistance de la population. Ainsi le nombre d'élèves scolarisés passent de 13 000 en 1870 à 3 000 en 1880 avant d'être supprimés. Ces grandes oeuvres permettent en grande partie le désenclavement de ces régions grâce à la construction de réseaux routiers et ferroviaires. C'est à travers tous ces travaux que l'on voit cette missin civilisatrice et forment la vitrine de la colonisation car elle transforme le paysage et permet le développement des sols et sous-sols. La France a donc d'après Paul leroy-Beaulieu des « facultés colonisatrices » ( l.4 ). Elle fut à une époque récente la deuxième puissance coloniale derrière l'Angleterre et a donc prouvé sa capacité de colonisateur. Ses héritages coloniales peuvent donc servir de base à de nouvelles expansions. La métropole a des ouvertures maritimes notamment autour de la Méditerranée, elle possède une capacité militaire d'une puissance de rang mondiale malgré la défaite de 1871 et dispose de capacités financières, politiques et techniques lui permettant d'assurer des voies de communication avec les colonies ainsi qu'une organisation administrative de celles-ci. Il faut toutefois relativiser cette pensée face à la pratique colonisatrice dans ces territoires. Toutefois cette vocation civilisatrice et ces oeuvres permettent, pour Leroy-Beaulieu, la fusion ( assimilation partielle et progressive ) entre européens et indigènes indispensable à la paix et à la prospérité de cette civilisation.

    1)    La politique extérieure.

    Paul Leroy-Beaulieu préconise à la ligne 34 que la « politique continentale  (…) doit être essentiellement défensive » pour lui la politique de la France en Europe est trop risquée car confronté aux autres grandes puissances mondiales. Militairement il propose de se contenter de défendre le territoire métropolitain et non de se lancer dans les conquêtes européennes. Cependant on peut penser que la politique de conquête, vue par l'auteur, dans les colonies risqueraient de priver la métropole de troupes et ainsi de défense. D'où l'alliance qui intervient en 1891 avec la Russie et sécurise la France sur le continent lui permettant de s'investir dans ses conquêtes extra-européennes et satisafaire les « légitimes instincts d'expansion » ( l.36 ). Ce passage tout comme le précédant  s'adresse en particulier aux nationalistes. En effet, depuis la défaite de Sedan et le Traité de Francfort l'amputant de certains territoires, la France a besoin de compenser sa grandeur perdue afin de retrouver son rang sur la scène internationale et le garder. Car sans cette politique d'expansion cela revient à reculer face aux autres puissances. Les nationalistes, largement majoritaires dans l'opinion publique de l'époque, s'opposent à cette idée de conquête qui feraient oublier l'Alsace et la Lorraine. Cependant ces politiques d'expansion se heurtent également aux puissances européennes. Ces problèmes extérieurs ne font que diminuer l'importance du discours colonial. Celui-ci n'est déjà que très peu présent  en dehors des groupes politiques, économiques ou religieux. Cependant Gambetta puis Ferry tentent de redonner un élan à ces théories en les appliquant mais leurs successeurs De Frycinet et Duclerc n'ont que peu d'influence face à l'opinion plus revancharde que d'envie expansionniste paralysant les questions coloniales.

    Conclusion :

    On peut donc en conclure que la France possède en 1882 un véritable héritage à la fois par l'expérience de ses fautes passées, par les restes de son premier empire colonial mais aussi par ses explorations et conquêtes récentes. C'est aussi à cette époque qu'apparait une envie de politique coloniale. De plus la France peut adapter sa colonisation à s démographie sans que l'émigration ne lui pèse tout en améliorant sa situation économique par le biais d'investissement dans les colonies d'exploitation. C'est un véritable devoir également pour la France de transmettre sa science et son esprit à travers le monde pour le bien des peuples colonisés et pour l'avenir de la France dans le monde d'autant plus qu'elle en a les capacités financières, militaires et administratives. Cet extrait possède un intérêt certain et une portée importante puisqu'il influença les décisions dans les entreprises de conquêtes mais n'eut que peu d'impact d'un point de vue économique et dans l'opinion publique. On peut constater que ces écrits se vérifient encore aujourd'hui avec l'influence que continue de jouer la France dans ses anciennes colonies.

























           
                    Bibliographie :
   

    Dictionnaire :
    ⁃   
    ⁃    BIZERE Jean-Maurice; DROUIN Jean-Claude; KOSZUL Michel; MARX Roland; RUDESQ André-Jean; VAYSSIERE Pierre, Dictionnaire des biographies, le XXe siècle, Armand Colin, Paris, 1994.


    Ouvrages généraux :

    ⁃    MOLLIER Jean-Yves; GEORGE Jocelyne, La plus oingue des Républiques, Fayard, La Flèche, 1994.
    ⁃    MONNET Sylvie, La politique extérieure de la France depuis 1870, Armand Colin, Paris, 2000.
    ⁃    REMOND René, Introduction à l'histoire de notre temps 2 : le XIXe siècle 1815-1914, Seil, Paris, 1994.
    ⁃    TACEL Max, La France et le monde au XXe siècle, Relation Internationale Contemporaine, Masson, 1989.

    Ouvrages spécialisés :

    ⁃    BOUCHE Denise, Histoire de la colonisation française, Fayard, 1981.
    ⁃    COMTE Gilbert, L'aventure coloniale de la France : l'Empire triomphant 1871/1936, Denoël, Paris, 1988.
    ⁃    GIRARDET Raoul, L'idée coloniale en France 1871-1962, La Table Ronde, Paris, 1972.
    ⁃    MARTIN Jean, L'Empire renaissant 1789/1871 l'aventure coloniale de la France, Denoël, Paris, 1987.
    ⁃    MEYER Jean, Histoire de la France coloniale des origines à 1914, Armand Colin, Paris, 1991.

















                    Plan :

   

    I°) Les bases du second empire colonial français.

    1)    Héritage et fautes du passé.
    2)   
    3)    Explorateurs et conquêtes récentes.

   

    II°) Stratégie d'efficience des colonisations : la théorie de Paul Leroy-Beaulieu.
    1)    Colonies d'exploitation et capitaux.
    2)   
    3)    Colonies de peuplement et émigration.

   

    III°) Idéologie de la politique extérieure française selon Paul Leroy-Beaulieu.

    1)    Vocation et capacité colonisatrice de la France.
    2)   
    3)    La politique extérieure.

Le quinquennat, raisons et conséquences politiques



Le quinquennat, raisons et conséquences politiques

Introduction :

                  En France, la question de la durée du mandat présidentiel (article 6) a toujours fais polémique tout au long de la V e République. En effet, cette durée du mandat présidentiel, pendant plus de 125 ans a été de 7 ans. Ce septennat a  été instauré sous la III e République et son ancrage est tel qu’il ne sera pas remis en cause et sera choisi dans la Constitution de la IV République. C’est après de longues réflexions et non par fidélité du passé qu’il sera également appliquer à la Constitution de la V e République de 1958. Cependant, la remise en cause de cette durée ne va cesser de croître durant cette période. Le quinquennat, suite à la présidence de Charles De Gaulle apparaît dans la sphère politique. Il est d’abord exprimé dans le programme des socialistes en 1971 puis des communistes en 1972. Cette volonté de changement de la durée du mandat sera également évoquée par Pompidou dans son programme de 1973, soutenu par J. Chirac et Valéry Giscard d’Estaing. Puis, Lors de l’élection présidentielle de 1995, le quinquennat est au centre de tous les débats. Mais c’est après la dissolution ratée de 1997 de J. Chirac, que la question du quinquennat réapparaît. C’est en 2000, en pleine période de cohabitation, que le  quinquennat est proposé par V. Giscard d’Estaing. Pour cela, on pose la question directement au français lors d’un référendum, le 24 septembre 2000. Juridiquement, ce référendum est un succès avec 73% de oui mais politiquement c’est un véritable échec car on relève un taux record d’abstention : près de 70%.
On peut alors se demander si la mise en place du quinquennat présidentiel en France est un progrès pour assurer la démocratie dans la vie politique?
Tout d’abord, le quinquennat est la conséquence d’un contexte politique favorable. De plus, l’installation du quinquennat, a joué un rôle modificateur au sein de la vie politique française.


Plan :
I/ Le quinquennat : conséquence d’une politique inappropriée
A)    7 ans, c’est trop long
B)    Les méfaits des cohabitations

II/ Les effets du quinquennat dans la sphère politique française
A)    Raréfier la cohabitation
B)    Moderniser et démocratiser la vie politique
C)    Le risque majeur du quinquennat : un régime à l’américaine ?

I/ Le quinquennat : conséquence d’une politique inappropriée

A)   7 ans, c’est trop long
En effet, 7 ans, c’est bien trop long pour un président. Le septennat français fait alors figure d’exception, notamment au sein des pays européen. Il correspond enfaites, à un temps néo-monarchique, celui de l’amendement Wallon de 1875            . Ce septennat coupe alors le chef de l’Etat du peuple, favorise l’abus de pouvoir.
Sous De gaulle, le septennat ne fut en aucun cas remis en cause, car de Gaulle avait pour habitude d’interroger les français. En outre, à chaque référendum, il remettait sa légitimité en jeu. Lors de son échec au référendum de 1969, il décide tout naturellement de quitter le pouvoir car il n’a plus l’appui du peuple.
Avec la théorie gaullienne, le quinquennat est alors inutile car si chaque président engageait sa responsabilité par référendum, par exemple à mi-mandat, comme le souligne Duhamel dans son ouvrage le quinquennat, alors la question de renouvellement et de légitimité ne se poserait donc pas. Malheureusement, le recours au référendum n’est en aucun cas inscrit dans la Constitution et dépend ainsi du bon vouloir du président. Encore plus, quand le référendum correspond à la remise en cause de son mandat. Ceci explique le fait  qu’aucun des successeurs de De gaulle ne le fera : En effet, Pompidou ne remet pas en cause son mandat lors de son référendum de 1972 sur l’entrée du Royaume-Uni, de l’Irlande et du Danemark dans les communautés européennes.
De plus, le septennat s’est accompagné d’une conception extrême de l’irresponsabilité, qui permet de rester à l’Elysée quelques soient les désaveux infligés à l’électorat: Mitterrand en 1986 resta au pouvoir, malgré son échec de majorité aux élections législatives.
En pratique, le septennat est également trop long car aucun mandat n’a été mené à terme sous la V e république : De 1974 à 1981, V. Giscard d’Estain a pu exercer pleinement son rôle président. On peut qualifier en comparaison, les autres septennats de formels car les présidents n’ont pas pu durant les 7 années prévues, mettre leur projet, leur volonté au point et ont du un moment ou un autre cohabité avec l’opposition.
En théorie, selon l’esprit de la lettre de la constitution, un mandat long de 7 ans est justifié, car le président à seulement un rôle d’arbitre, n’a pas de rôle dans la conduite politique du pays. Mais dès de Gaulle, la pratique du pouvoir a été différente, en choisissant un mandat court, de 5 ans, on souhaite reconnaître ainsi que le Président est le véritable chef de l’exécutif, qui gouverne et pratique le pouvoir.

B)   Les méfaits des cohabitations

Le mandat présidentiel de 7 ans et le mandat parlementaire de 5 ans, explique les situations de cohabitation dans laquelle s’est retrouvée la France sous la V e République : de 1986-2002.
La cohabitation est l’inverse du fait majoritaire, c'est-à-dire que la couleur politique du président et du Parlement est différente.
On peut donc dire que les périodes de cohabitations sont des périodes de faits majoritaires mais en la faveur du premier ministre : on peut dire ainsi que c’est lui qui gouverne et non le Président.
Pour les détracteurs de la cohabitation, cette dernière va à l’encontre de l’esprit de la constitution car elle paralyse le régime : On peut voir cela en 1986, lorsque Mitterrand refuse de signer en Conseil des ministres les ordonnances, prévoyant la privatisation de certaines entreprises publics. Certes, le président ne peut gouverner il peut empêcher le gouvernement de mener une certaine politique en se retranchant dans son rôle de protecteur national.
Cependant, les 3 périodes de cohabitation ne se sont pas toutes ressemblé :
-       De 1986-1988 : On a donc comme on la vu précédemment, une période de cohabitation conflictuelle entre l’exécutif et le législatif
-       De 1993-1995 : Mitterrand se montre plus effacé, en effet, il n’envisage pas de se présenter aux élections suivantes donc on a ici  un gouvernement qui gouverne.
-       De 1997-2002 : Après l’échec d’une dissolution : le président est alors désavoué. Malgré cela, il se maintient mais ne joue aucun rôle sur le devant de la scène politique, ni même celui de garant, d’arbitre comme le mentionne la Constitution. Le premier ministre, L.Jospin gouverne alors seul.
Les effets de la cohabitation sont donc d’amoindrir la fonction présidentielle. Certes, la dissolution de l’Assemblée Nationale en début de mandat présidentielle donne au président les moyens de mettre en œuvre son projet, mais la différence de la durée des mandats législatifs et présidentiels peut être source de difficultés pour les deux dernières années de son mandat.
La longue cohabitation dans laquelle s’est trouvée la France depuis 1997, a finalement incité l’exécutif à proposer une réforme afin de faire coïncider la durée des mandats du président et des députés.
((Cependant, avant cela, une autre solution avait été envisagé, notamment par Marcel Jeanneney, économiste, ancien ministre sous de Gaulle, qui voulant garder le septennat, proposa la solution du septennat révocable, évitant ainsi l’irresponsabilité et les cohabitations abusives. La Constitution mentionnerait donc que deux mois à la suite d’un référendum lors duquel le Président a engagé sa légitimité ou alors après les élections législatives, une motion de censure peut être votée à son égard, mettant fin à son mandat. Il est clair, que ce projet n’aboutira pas, le Président ou ceux qui veulent l’être ne sont pas près à subordonner leur pouvoir. ))
II/ Les effets du quinquennat dans la sphère politique
Le choix du quinquennat s’est donc confirmé lors du référendum le 24 septembre 2000 et sera applicable dès les élections présidentielles de 2002. Le but étant de faire concorder les mandats présidentiels et les mandats des parlementaires.
A)   Raréfier la cohabitation
Depuis l’affaiblissement du pouvoir présidentiel depuis 1997, le quinquennat a un  but essentiel : rationaliser le fait majoritaire en limitant les périodes de cohabitation.
 Mais il faut apporter des nuances : l’adoption du quinquennat seul n’a pas réglé la cohabitation. Il a en effet fallu l’intervention d’une loi organique, qui a reporté au troisième mardi de juin, l’expiration des mandats des députés, afin d’être sure que les présidentielles auraient bien lieu avant les législatives, dans l’idée que les électeurs confirmeraient leur choix des présidentielles aux législatives.
De plus, La concordance des mandats n’assure pas un fait majoritaire parfait : les électeurs pouvant ne pas offrir une majorité franche au Président nouvellement élu. C’est ce phénomène, qui confirme le fait que la bipolarisation de la vie politique est de moins en moins parfaite.
Enfin, le quinquennat ne peut pas être considéré comme une arme définitive contre la cohabitation car l’un des deux mandats peut s’arrêter un moment ou un autre. S’il semble peu probable qu’un président décide de dissoudre l’Assemblée Nationale en milieu de mandat alors qu’il a la majorité, on peut fortement imaginer des hypothèses de fin de mandat présidentiel : décès, démission, destitution du Président de la République… Cependant, il suffirait simplement au Président de dissoudre l’Assemblée nationale pour permettre de nouveau une concordance.
ð Le quinquennat signe en théorie l’arrêt de mort de la cohabitation.

B)   Moderniser et démocratiser la  vie politique
L’élection du président de la République a toujours intéressée la population, qui durant une période donnée est au centre de tous les intérêts, notamment par la médiatisation importante. Le pouvoir d’un pays se trouve alors incarné à travers une personne, choisi par l’ensemble des citoyens. Avec le quinquennat, la fréquence des élections présidentielles est alors plus nombreuse qu’avec le septennat et permet au peuple d’exprimer plus souvent sa souveraineté, principe de base de la démocratie. On estime, en l’état de notre espérance de vie,  qu’un Français élisait  6 ou 7 fois son Président avec le septennat, 11 fois dorénavant avec le quinquennat.
De plus, la durée d’élection du président est précise : il pourra ainsi exercer sa politique, sans paralysie supposée, durant 5 années.
La vie politique française avec le quinquennat est plus active et attractive car face à la majorité, l’opposition peut s’exprimer pleinement. Elle est ainsi libérée des contraintes de la cohabitation, qui l’obligent à soutenir des réformes acceptées par son Président. 
La responsabilité présidentiel est également remise en jeu car lors des prochaines élections, deux choix s’offrent aux citoyens : renouveler leur confiance ou choisir l’alternance.
C)    Le risque majeur du quinquennat : Vers un régime à l’américaine?
L’un des éléments récurrents en défaveur du quinquennat est l’idée que l’on aurait un régime de type présidentiel, comme par exemple aux USA. Cependant, cela semble compromis car on imagine mal en France le Président signait des traités que le Parlement n’aurait pas autorisé à ratifier, le gouvernement ne serait alors plus responsable devant le Parlement. Pour avoir un régime à l’américaine, il faudrait pratiquer de nombreuses modifications : notamment, le changement de scrutin pour l’élection des députés pour ainsi avoir des majorités fluides, comme au sein du Congrès. De plus, le régime présidentiel n’évite pas, comme le quinquennat le prône, la cohabitation. En effet, il risquerait de les multiplier car le régime présidentiel désolidarise la majorité parlementaire de la majorité présidentielle. On aurait alors non pas des cohabitations au sein de l’exécutif mais au sein du législatif.
Le quinquennat n’entraînerait donc pas un régime présidentiel car on n’a le maintien de la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée, le maintien de la fonction du premier ministre et du droit de dissolution pour le président, et aucune présence de vice-président.
On peut  donc considérer que le quinquennat a rationalisé la pratique de la fonction présidentielle : certes, le quinquennat n’est pas en conformité avec le rôle que lui donne la constitution mais il n’a rien changé au pouvoir ou à l’autorité du Président de la République. Ce n’est en effet pas lui qui a créée l’hégémonie présidentielle, il n’a fait en réalité qu’entériner une pratique qui date de 1958.  
Conclusion :
Avec le quinquennat, le pouvoir politique du président est clairement identifié : on a un président qui mène la politique du pays. Il est un facteur de lutte contre l’affaiblissement de la légitimité et de la responsabilité politique. Cependant, même si le régime français depuis 2000, n’a pas d’organisation typique d’un régime présidentiel, le quinquennat a augmenté de manière accru la présidentialisation du régime. Pour contrer cela, en juillet 2008, la révision constitutionnelle, à l’initiative de N. Sarkozy vient modifier l’Article 6 de la constitution. C’est notamment pour éviter la concentration des pouvoirs, pour endiguer la présidentialisation du régime que l’on va introduire dans la Constitution, le principe d’une limitation au renouvellement du mandat présidentiel. Depuis la réforme de juillet 2008, l’article 6 stipule : « le président de la République est élu pour 5 ans au suffrage universel direct. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. ».Mais cette révision n’a pas changé l’aspect du mandat présidentiel et l’omniprésence du président est toujours vivement critiquée. On peut désormais se demander, à l’approche des élections présidentielles de 2012, quel rôle, le nouveau président va jouer dans la vie politique française.

Reprise :
è Réforme qui survient lors de la 3 e cohabitation
è Quinquennat sec= qui n’implique aucune autres réformes. Mais survient ensuite  la mise en place des présidentielles avant les législatives => Donc c’est une notion à nuancer
è Idée ancienne, car introduite dans le débat par Pompidou en 1973


I/ Les raisons

A)   Eviter au maximum les cohabitations
B)   Conforter la lecture présidentialiste de la constitution
C)    Renforcer le contrôle du peuple sur le président
II/  Conséquences
A)   La bipolarisation et la clarification de la vie politique
B)   Renforcement du présidentialisme au détriment du Parlement
C)    Dérives césaristes


L’Exposition coloniale internationale de Vincennes de 1931



     L’Exposition coloniale internationale de Vincennes de 1931


Introduction :
                  L’Empire français dans les années 1930 a retrouvé son prestige colonial et a atteint son apogée territorial et démographique. Face à cela, les dirigeants ont besoin de créer au sein de la population française une véritable conscience coloniale, notamment à travers  différentes manifestations.  En effet, dès les années 1870, de grandes expositions universelles ont fleuri sur le territoire national français, ces dernières réservant une place croissante aux sections coloniales.  On peut souligner que Marseille a notamment accueilli deux expositions purement coloniales, en 1906 et 1922. Mais, après la fête du centenaire de la conquête de l’Algérie en 1930, c’est l’Exposition coloniale internationale de 1931, qui marqua, plus que tout autre exposition, les mémoires. Le 6 mai 1931, Gaston Doumergue, président de la république, accompagné du maréchal Lyautey, inaugure l’Exposition coloniale internationale, qui s’étend sur 110 hectares autour du lac Daumesnil, au bois de Vincennes. Cette manifestation marque l’apothéose de la III e République qui voulait convaincre l’opinion publique de la puissance coloniale de la France. Bien que toutes les colonies ainsi que les pays sous protectorats soient représentés, l’exposition met en avant l’Afrique noire, Madagascar, l’Afrique du Nord, l’Indochine ainsi que la Syrie et le Liban. Elle présente également les colonies étrangères, d’où sa vocation internationale. Il faut attribuer d’abord le succès de cette exposition à la bonne organisation de l’opération par Lyautey, commissaire de l’Exposition, qui a déjà compris les techniques modernes de la communication. De ce fait, plus de 33 millions d’entrées, soit près de 8 millions de visiteurs ont parcouru l’exposition et ont pu vivre l’illusion d’un voyage dans le monde colonial, on note que c’est la plus grande affluence qu’est connu une exposition parisienne depuis l’Exposition universelle de 1900. L’année 1931 est une année propice à l’exposition car c’est sans doute la dernière des années de l’avant guerre dans lesquelles les français ont pu croire à un avenir sans conflits. En effet, la paix en Europe semble assurée, grâce à la politique de conciliation menée par Aristide Briand mais aussi grâce à la suprématie militaire française. Mais la France connaît aussi une véritable prospérité économique et paraît ainsi échappé à la crise qui frappe le monde depuis le krach de Wall Street d’Octobre 1929. Ce projet d’exposition à pour but essentiel de défendre l’œuvre coloniale ainsi que de former une pensée coloniale dans un Empire, qui constitue un élément de force fondamentale pour la France.
On peut à présent se demander en quoi l’exposition Coloniale internationale marque l’apogée de l’Empire français ?
Tout d’abord, nous analyserons la formation d’une véritable conscience coloniale. Mais aussi le fait, que cette exposition est une manifestation nationale et internationale. Et enfin, que la sphère politique française s’est fortement engagée à travers cette exposition.
I/ La formation d’une conscience coloniale
A)   L’Exposition, objet de propagande
L’Exposition coloniale internationale de Vincennes de 1931 correspond au paroxysme des efforts de propagande que ce soit financiers, matériels  et humains de la République en matière coloniale. En effet, il s’agissait d’un évènement ponctuel, destiné à créer l’étincelle d’intérêt pour les colonies françaises. Cette exposition devait selon ses auteurs provoquait dans la population une véritable fièvre pour les colonies.
Pour le parti colonial, qui restait fidèle à ses attaches républicaines, l’Exposition devait être un inventaire, une démonstration et elle devait servir avant tout à l’idée coloniale dans le pays. Ce sont les parlementaires du parti qui ont convaincus Lyautey de la nécessité d’un gros effort financier pour la propagande intérieure. En effet, Lyautey en 1928, n’avait affecté que 5 millions pour cet usage. Mais grâce au groupe colonial de la Chambre, Lyautey obtient par la loi du 18 mars 1931, un crédit supplémentaire de 12 millions, pour mener à bien son projet.
Pour se faire, la presse, les cartes postales, les périodiques, illustrés ou non, les brochures, les livres furent utilisés pour l’Exposition : de multiples affiches furent placardées dans tout Paris, affiches qui présentent les différents types de populations, censées résumer la variété des cultures et des races du monde colonial. Ces affiches/ peintures s’accompagnent de slogans sans équivoques, comme par exemple le fait de pouvoir faire le tour du monde en un jour. Cela illustre parfaitement cette volonté de séduire les métropolitains et de les rassurer sur les vertus du colonialisme. De plus, tout au long de la manifestation, qui dura plus de 6 mois, l’esprit de propagande coloniale avait été entretenu par l’organisation de 200 congrès, dont le sujet était centré sur l’enseignement des futurs agents coloniaux, en promouvant notamment l’étude des langues indigènes.
                  Durant toute la durée de l’Exposition, on voit une démultiplication des articles en faveur de la question coloniale. La grande presse, comme Le Petit Parisien, qui a le plus fort tirage français se lance dans les grandes enquêtes et reportages sur les colonies : une rubrique coloniale  est instituée, Le Temps. Mais d’autres journaux, comme le Journal des débats, lance sa chronique, « Revue coloniale » avec l’écrivain André Gide, qui insiste sur l’émerveillement devant une telle réalisation. Dans tous les journaux de l’époque, les lecteurs peuvent ainsi admirer des publicités pour l’Exposition, dont certaines sont de véritables chefs d’œuvres de compositions pour sublimer les colonies. Avec ces quelques exemples, on constate alors aisément que la presse, dans son ensemble montre alors un intérêt prononcé pour le domaine colonial à travers l’Exposition, qui permet ainsi au sein de la population française  d’étendre une conscience pro coloniale.  
Les missions catholiques  et protestantes sont également représentée au travers  l’Exposition : en effet, un pavillon, leur sont consacrées, ce qui montre bien la promotion des bienfaits des missions dans le monde des colonies, qui permettent notamment l’instruction de la population, la transmission de la religion à l’Occidentale.
Cette Exposition avait donc pour but de dire aux français les bienfaits de l’apostolat colonial, l’idée des dirigeants est donc de faire passer à travers l’Exposition,  l’idée que  grâce à la colonisation, les colonies ont pu jouir de la bonne civilisation, la civilisation occidentale. Quant au but essentiel, le ministre des Colonies, Paul Reynaud le formula ainsi le jour de l’inauguration : « Donner aux Français conscience de leur Empire ». « Il faut que chacun de nous se sente citoyen de la Grande France ».
Le système de propagande mis en place autour de l’Exposition a donc permis la réussite de cette dernière, qui s’est en effet accompagné de plus de 8 millions de visiteurs  en 6 mois.
B)   Une volonté d’instruction de la population française
L’Exposition coloniale internationale de 1931 a d’abord été pensée comme vecteur d’instruction du peuple français, selon les traditions de spectacle du parti colonial.
L’Exposition avait en effet pour but de provoquer chez le visiteur l’illusion d’un voyage dans le monde colonial, en lui promettant « le tour du monde en 1jour». Des affiches publicitaires vantées cela, avec des slogans tels que « Pourquoi aller en Tunisie quand vous pouvez la visiter aux portes de Paris ? ».
Le visiteur était donc embarqué dans un voyage planétaire autour du lac Daumesnil, il pouvait alors se glisser d’une colonie à l’autre, d’un palais marocain à la rue d’un village soudanais par exemple. Cette Exposition didactique ne manqua pas de moyens pour formater l’opinion de la population. En effet, on organisa au sein de cette dernière des caravanes et des courses de chameaux, des promenades en pirogues malgaches sur le lac. Mais aussi, on fit découvrir à la population française un autre type de saveurs avec la gastronomie coloniale. Des souks tunisiens, des restaurateurs africains ou tunisiens, le « café du Cameroun » notamment, qui révélaient au peuple des mets qui lui étaient jusque là inconnu, comme les pâtisseries arabes ou les boissons exotiques. Sous cet apparat de « parc d’attraction », la visée didactique et instructive des dirigeants est bien présente.
De manière plus visible, la Cité des informations offre  aux visiteurs un guide officiel avec  statistiques, graphiques, cartes établies par les services officiels, mais aussi par les chambres de commerce et les associations coloniales. Son but est d’être un instrument de travail pour les hommes d’affaires désireux de s’informer sur les différentes colonies françaises auprès de personnels spécialisés.  Mais l’information est aussi destinée à un large public. En effet, le Musée permanent de la porte Dorée propose une rétrospective de l’histoire coloniale française. Une station, dite Radio-Colonial a été crée spécialement pour l’occasion. La manifestation est aussi l’occasion de réunir des congrès économiques ou scientifiques. Congrès de la Confédération des travailleurs intellectuels, états généraux du féminisme, ségrégation ethnique.
Certaines intensions des organisateurs furent fermement soulignées, pour formater les consciences : En effet, en ces années où le sort de l’Indochine était remis en question, elle eut une large place au sein de l’Exposition, « joyau  de la colonisation française » : Elle représentait le dixième de la superficie de l’Expositions.
Grâce à cette vive propagande, les  autorités françaises estimèrent que le public avait été « séduit et instruit ». Les Français ne pouvaient désormais pas oublier qu’ils avaient un Empire. Les colonies ne représentent alors plus ces terres inconnues que la presse de l’époque évoquée si souvent avant l’Exposition (l’Illustration). Les Français ont alors plus confiance dans la grandeur de la France, confiance qui n’était pas clairement exprimé avant cela.
Pour les autorités de la République, leur but avait été atteint : l’esprit colonial avait pénétré les masses populaires. Pour le ministre des Colonies, Paul Reynaud, initiateur de l’Exposition, l’Empire français était devenu un bloc indivisible et les Français ressentaient alors l’honneur d’en être les citoyens. On peut voir la naissance de cette conscience coloniale grâce à l’Exposition dans le discours d’André Tardieu, qui avait écrit dans l’Illustration de Janvier 1931 : « Chez nous la conscience impériale est à naître », il affirmait 10 mois plus tard : « elle est née ».
Cependant, il faut nuancer la visée didactique de l’Exposition car après cette dernière des militants de la cause coloniale, des journalistes furent dans l’ensemble déçu face à son aspect instructif. En effet, pour eux, l’Exposition n’avait pas été assez éducative, et n’avait pas revêtu dans son ensemble ce caractère d’enseignements : pour ces derniers,  elle avait peut-être atteint les masses et la jeunesse mais elle n’avait rien modifié à la mentalité des cerveaux adultes, ou ceux qui n’étaient pas par avance convaincus.
II/ Une manifestation nationale et internationale
A)   Promotion culturelle et économique de la « Grande France » ?

1.     Une promotion culturelle nationale réaliste?
Le site de l’exposition se divise en 4 sections : la France métropolitaine, les territoires d’outre-mer, les pavillons nationaux et le musée permanent des colonies.
Le but de l’Exposition était de recréer, des temples, des éléments symboliques des colonies françaises, pour permettre de montrer aux Français comment chaque colonie vivait, dans quel milieu,  montrer en quelques sortes les richesses de l’Empire. D’un point de vue architectural, c’est une véritable réussite. On peut le voir, à travers le chef d’œuvre architectural de la section coloniale et le clou « touristique » de l’exposition, celui qui va marquer tous les esprits : une reproduction grandeur nature d’Angkor Vat qui occupe 5 000 mètres carrés et dont la tour centrale atteint 55 mètres. On trouve à l’intérieur du temple, 80 dioramas dans des salles éclairées par un plafond voûté en blocs de verre translucides formant une fleur de lotus gigantesque. On peut y voir aussi des mannequins habillés de manière « authentique », des cartes, des maquettes d’édifices « indigènes » et un mur d’images illuminées comportant à peu près  1000 diapositives.
Comme dans les précédentes expositions, des spectacles authentiques furent donnés : par exemple, on ressuscita avec des figurants autochtones le cortège du roi Béhanzin ou celui du Morto-Naba et l’on fit défiler dans leur uniforme d’apparat les dignitaires malgaches qui entouraient la reine Ranavola III avant 1895.
Le public put également entendre des orchestres africains, malgaches, des musiciens de cafés maures ou à admirer des ballets annamites et des troupes de danseurs noirs.
L’Exposition peut se visiter certes de jours mais aussi de nuits : des nuits coloniales ont été également organisés, le but étant de mettre en valeur les pavillons, de faire de l’Exposition, une fête éblouissante, remplie de féerie. Ces nuits sont d’immenses succès, qui laissent de nombreuses traces dans les journées de l’époque : par exemple, la nuit du 13 juillet est intitulée la féerie coloniale, car elle s’est finalisée par un immense feu d’artifice sur le lac Daumesnil. Ces nuits sont alors la démonstration de progrès techniques considérables : Pour se rendre compte, on peut citer que huit câbles à haute tension de 12 000 volts auront été nécessaire pour éclairer l’Exposition de nuit soit l'équivalent de la consommation électrique d'une ville de 100 000 habitants.
Cependant,  L’exposition de Vincennes se voulut un spectacle d’art où la beauté et la couleur des architectures l’emportaient sur le strict réalisme. En effet, de nombreux pavillons dits de style local furent de libres interprétations, non de reconstitutions fidèles. Ainsi, le palais rouge de Madagascar, surmontée d’une tour en tête de bœuf, correspond à une pure création parisienne. Dans cette idée, le bois de Vincennes, pour l’occasion fut orné de somptueux palmiers dattiers, alors que ce palmier est rare sur les côtes d’Afrique. De plus, en dressant de luxueux décors et en y plaçant d’authentiques personnages vêtus d’habits de fête, les organisateurs créèrent des impressions d’esthétiques, tout aussi erronée. En effet, l’Exposition ne montre pas la grande misère des paysans d’Indochine, elle reste donc un reportage non fidèle
Ce que les visiteurs de l’exposition du bois de Vincennes perçoivent sous forme d’exotisme et de pittoresque est une réponse esthétique face à une mise en scène théâtrale dont la vraisemblance devient un objet de curiosité en soit. En effet, personne ne confond le fameux temple d’Angkor Vat avec l’original mais cette copie exerce une force impressionnante sur les visiteurs car à cette époque les voyages à l’étranger se font rares. L’attrait culturel des visiteurs s’expliquent donc par cela, même si, l’architecture de l’Exposition détourne souvent la copie de l’original.
2.     Promotion économique des colonies ?
Lyautey, commissaire générale de l’Exposition insistât pour que l’Exposition mette en avant les progrès économiques dus à la colonisation. En effet, les colonies sont les plus gros clients de la France et  également les  premiers de ses fournisseurs : par exemple, le quart de la production totale de tissus de cotons sont absorbés par les colonies.  
L’Exposition est alors le lieu de divers publicités d’ordre commercial, de promotion économique :
-        Le chocolat menier
-        L’automobile Rosengart
-        Boisson Ricqulès et Suze
-        Brasserie « chez Jenny »

Cependant, l’aspect économique  des colonies avec notamment des photographies de réalisations industrielles, des statistiques sur le mouvement commercial, des collections d’échantillons n’intéressèrent pas le grand public, qui préférait les salles contenant des arts décoratifs, les représentations des « indigènes », on peut dire plus globalement l’aspect vivant, plus « réaliste » de l’Exposition.

B)   La participation de nations étrangères
Comme son nom l’indique, il s’agit d’une manifestation internationale. Le maréchal Lyautey souhaitait ainsi amené les concitoyens à comprendre, grâce à la participation des autres puissances coloniales, que les Français n’ont pas été les seuls à participer à ce qu’ils appellent « le plus grand fait de l’histoire ». Il voulait aussi  amener les Français à comparer leurs méthodes à celles des autres puissances, en particulier pour leur montrer que les méthodes Françaises sont plutôt bonnes.
Cependant, toutes les puissances coloniales ne sont pas présentes à Vincennes. Les Espagnols, en froid avec les Français sur les questions marocaines ont déclinés l’invitation, les Japonais également car ils ne voulaient pas montrer de solidarité avec les puissances « blanches ». Bien évidemment, L’Allemagne n’en fait pas partie car le traité de Versailles de 1919, a privé l’Allemagne de ses colonies au profit de la France (Syrie, Liban) et de l’Angleterre notamment. L’URSS, comme une évidence ne fait pas partie de l’Exposition  car Staline est un adversaire de toute forme d’impérialisme à part le sien.
Les Anglais ne s’associent que discrètement à cette manifestation, sous forme d’un stand de la Cité des informations. En effet, La Grande-Bretagne, invitée depuis 1921, faisait traînée sa réponse en multipliant les objections : elle préparait jusqu’en 1924, la British Empire Exhibition, manifestation coûteuse, qui diffusait la mentalité impériale des Anglais. Néanmoins, malgré ce premier refus, Lyautey ne lâcha pas l’affaire et à trois reprises il insista pour la présence de l’Imperial Institute à l’Exposition mais cela se termina par un second échec. Les Anglais se montrèrent alors totalement indifférents à l’égard de ce projet colonial français. Mais, c’est à cause de leurs difficultés économiques dûes à la crise, qu’ils durent se résigner à participer,  même discrètement.
Malgré cette mince participation, Paul Reynaud, organisa une réception solennelle en l’honneur du grand écrivain Rudyard Kipling, chantre de l’Empire britannique.
Mais la participation des autres puissances coloniales est moins réservée : en effet, 2 hectares sont attribués au Congo belge, 3 hectares aux possessions des Pays-Bas (dont les Indes néerlandaises). L’Italie fasciste célèbre quant à elle son domaine africain : Somalie, Libye, Erythrée. Le Portugal souligne l’importance de ses possessions en Angola et au Mozambique. La Palestine est également présente, qui même sous mandat britannique édifia un luxueux pavillon.
De manière moins attendue, le Danemark et les USA figurent à l’Exposition. Les Danois ont consacré leur pavillon au Groenland. La section américaine est représentée par la reconstitution de la maison de Georges Washington mais aussi par des expositions sur l’Alaska, Porto Rico, Hawaï.
En Outre, seulement 5 Etats Européens décidèrent de participer à l’Exposition. Le rêve de Lyautey d’avoir une Europe réconciliée et solidaire dans l’œuvre coloniale se révélait ainsi irréaliste.
Cet échec passait sous silence, contribua involontairement à rendre étroitement française la grande exposition coloniale internationale. Plus qu’une Exposition internationale, cette Exposition est au final un bilan de l’activité économique, politique et culturelle de la France coloniale.
III/ L’Exposition et la politique française
A)   L’Union des politiques 
A travers l’Exposition, on voit bien que la question de l’Empire français est une question avant tout politique.
Cette Exposition est alors le témoignage d’une union assez étonnante antre les droites et les gauches, qu’en théorie tout oppose. En effet, ils se rassemblent tous les 2 sous un discours glorificateur au moment de l’Exposition.
C’est tout d’abord, la droite modérée, qui est au pouvoir, qui s’est investie pleinement dans « l’œuvre coloniale ». A l’image de Paul Reynaud, symbole de l’attachement de la droite parlementaire à l’empire et au sein du parti colonial français. Il mène des  actions au ministère, qui permettent  une réorganisation des différents services, l’élaboration et la préparation de l’Exposition coloniale. Lors de son discours en 1931, il a alors qu’une seule idée en tête, qui est de faire prendre conscience à chaque citoyen français de son appartenance à l’Empire. Quant à gauche, la question coloniale, la conscience nationaliste est également au cœur de sa pensée. Ces idées patriotiques  se révèlent de manière accrues lors de l’Exposition coloniale de 1931. On peut voir cela, notamment dans la presse, avec notamment le journal radicale, la République, qui propose durant toute la durée de la manifestation, une page coloniale ponctuelle.
L’opinion à droite comme à gauche semble globalement conquise par cet empire : les grands reportages dans la presse, le nombre impressionnant de films et bien évidemment l’Exposition coloniale explique ce phénomène d’Union des politiques.
Cette date de 1931, représente alors sans conteste une étape fondamentale dans la prise de conscience des droites et des gauches de l’engouement des Français pour leur empire et l’importance des colonies pour établir un nouveau cadre économique. Mais leur prise de conscience « commune » souligne aussi leur aveuglement dans cette culture coloniale identique dans plus de 40 ans de conflits coloniaux. Ce Grand moment national, patriotique, républicain qu’est l’Exposition coloniale internationale de Vincennes reste et demeure un moment d’Union nationale comme jamais jusqu’alors n’en avait connu l’entreprise coloniale en France.
Cependant, malgré cette Union des droites et des gauches, un  courant politique se détache de ce groupe : les communistes.
B)   La réplique des anticolonialistes
Face à la mobilisation du parti colonial, les anticolonialistes, qui étaient pour l’essentiel des membres du parti communiste, avaient décidé d’intensifier leur action. En effet, le Komintern avait trouvé que la mobilisation et la propagande anticolonialiste avait été trop peu active lors de la fête du centenaire de l’Algérie en 1930. Il chargea la Ligue contre l’oppression coloniale et l’impérialisme, le parti communiste français, la CGTU de lancer une campagne contre l’Exposition coloniale internationale de Vincennes en 1931.
Ils décidèrent ainsi d’organiser, en réplique de l’Exposition coloniale internationale, une « Exposition anti-impérialiste » à Paris, intitulée : « La vérité sur les colonies ». Cette contre exposition, qui a lieu au pavillon des soviets à Paris, avait pour but de montrer un ensemble de photographies de guerres coloniales, des dessins satiriques et des graphiques sur les profits des sociétés capitalistes. L’écrivain Aragon, y participa, en y exposant des collections d’objets d’art nègres, symboles du mauvais goût à l’Occidental. Malgré sa durée exceptionnelle de juillet 1931 à février 1932 et des visites collectives organisées par les syndicats, seulement  5 000 personnes visitèrent cette contre exposition.
Cependant, d’un point de vu local, des comités de lutte contre l’Exposition coloniale se formèrent et agirent plus efficacement que la contre exposition :
-        Pour se faire des tracts  furent distribués aux différents colonisés dans leur langue maternelle pour dénoncer « l’oppression des impérialistes », le fait que les dirigeants français les prenaient pour des bêtes de foires au sein de l’Exposition.

Des brochures communistes furent distribuées, qui dénonçaient la violence, les répressions faits aux colonisés, contrairement aux impérialistes, le Parti communiste se disait pour la libération et l’indépendance des colonies.
On a une propagande communiste quotidienne, à travers des journaux comme l’Humanité, qui réprime les méfaits de la « foire de Vincennes ». Les communistes dénoncent aussi la gauche française, la SFIO, qui s’est alliée à la droite, pro coloniale : « Les chefs de la SFIO aux côtés des pires colonialistes ».
Pour être plus persuasif, le parti communiste mobilisa 12 écrivains du groupe surréaliste comme Aragon, André Breton,  René Char, pour rédiger un très long tract intitulé : Ne visitez pas l’Exposition coloniale : ils exigeaient notamment : « l’évacuation immédiate des colonies ».
Cependant, tous ces efforts pour contrer l’Exposition peuvent être interprétés comme un échec car l’anticolonialisme en 1930 n’atteignait pas les militants communistes et les travailleurs socialistes, qui ne répondirent pas aux différents appels des dirigeants communistes pour faire évacuer les colonies.
Conclusion :
Pour conclure, l’Exposition coloniale Internationale de Vincennes de 1931 a joué un rôle important dans la formation et la confirmation d’une idée pro coloniale chez les Français. Ce lieu de propagande,  tel que le voulait ces dirigeants étaient destinés à promouvoir les colonies, même à travers une image, qui est loin du réalisme. Cet enseignement colonial inédit visait surtout à émerveiller la population française avec la découverte d’une culture exotique, qui lui était à l’époque peu connue. Ce voyage en 1 jour est une véritable réussite dans la population d’une part par sa grande affluence mais aussi dans la construction d’une conscience impériale chez les Français. En effet, on peut dire que l’exposition a contribué à forgé cette conscience car d’après un sondage de 1939, réalisés par l’IFOP, on estime que  pour 53% des français, ce serait « aussi pénible de devoir céder un morceau de notre empire colonial qu’un morceau du territoire français ».  Les populations jeunes, de moins de 30 ans étant les plus touchées par cet engouement colonial. Malgré cela, l’Exposition coloniale de 1931 est aujourd’hui absente dans la mémoire collective des Français, moins que l’oubli de l’Exposition, cela traduit la volonté française d’oublier l’histoire coloniale dans son entier. En Outre, Vincennes reste néanmoins un évènement primordial, marquant l’apogée de l’Empire colonial français, véritable apothéose impériale, qui cède pourtant au cours des trois décennies suivantes, aux mutations politiques et sociales, que provoquera la décolonisation.